vendredi 29 janvier 2010

Troisième visite du professeur Falgout

"...Et puis quelque chose est arrivé, totalement absurde et inattendu...
Cet été là, Olivia dut passer quelques semaines à Vérone pour y régler de pressantes affaires familiales. Je restai à N. pour y préparer ce qui devait être la fin de mon deuxième cycle. Sans doute étais-je un peu fatigué par l'année d'étude qui se terminait, peut-être aussi agacé par l'absence imprévue d'Olivia qui nous avait contraint à renoncer à parcourir l'Australie cet été là, mais j'étais plutôt serein et je n'avais pas de raison particulière d'être "stressé" comme on dit aujourd'hui. Voilà comment la chose s'est passée; un matin, je me suis levé plus tôt que d'habitude dans un état d'exaltation étrange. Le soleil d'été réjouissait déjà le centre de N. et je décidai illico d'aller prendre mon petit-déjeuner à l'extérieur. Je parcourus les rues animé d'une joie intérieure aussi violente qu'incompréhensible. Il me semblait que j'allais vivre des évènements extraordinaires, que ma vie allait tout à coup devenir une aventure permanente, sans temps morts, sans moments d'ennui. Mes pas me conduisirent jusqu'à la gare et, repoussant à plus tard mon petit déjeuner, je sautai dans le premier train pour Paris sans avoir acheté de billet. Le wagon n'était occupé que par de rares passagers et je m'installai assez à l'écart, conscient tout à coup d'être la proie d'une étrangeté qui pouvait peut-être susciter de la curiosité. Mais ce sentiment d'inquiétude ne fut que fugitif. Il fut très vite supplanté par une impression d'omnipotence et d'invulnérabilité qui me fit croire que rien ne pouvait m'arriver de mal et que je pouvais tout me permettre. Du fond du couloir je vis surgir trois contrôleurs qui tout en devisant gaiement venaient vérifier nos titres de transport. Non seulement je n'étais pas inquiet mais je restai persuadé que la situation tournerait forcément en ma faveur sans que j'aie besoin de lever le petit doigt. Les fonctionnaires se mirent à l'oeuvre, arrivèrent à la hauteur d'un jeune homme qui se trouvait à quatre sièges du mien et qui se révéla être aussi un resquilleur. Au lieu d'accepter la procédure et l'amende qu'on voulait lui infliger, il se mit tout à coup à protester et vociférer tant et si bien que les contrôleurs durent alerter la gendarmerie de manière à ce qu'il soit débarqué à la gare suivante. L'incident leur fit ignorer les autres voyageurs. Je me sentais comme protégé par une puissance occulte et bienveillante.
Une fois à Montparnasse, j'entrepris de parcourir Paris comme un illuminé, sans but concret mais persuadé que je suivais intuitivement un plan qui devait me conduire à un destin hors norme. Après des heures de marche au cours desquelles je remontai jusqu'aux Halles pour me diriger ensuite vers l'est parisien, je me retrouvai finalement au cimetière du Père-Lachaise dont je me mis à parcourir les allées en tous sens. Malgré ma tension intérieure qui n'allait pas diminuer dans les heures et les jours qui suivirent, j'avais tant marché que je m'effondrai tout à coup sur un banc, non loin de la tombe de Gérard de Nerval. Il me vint alors l'intuition que mes véritables parents n'étaient pas les modestes employés que je connaissais depuis toujours mais d'autres à la position sociale beaucoup plus enviable. Dans mon esprit délirant, je fantasmais mon vrai père comme le puissant responsable d'un grand groupe industriel français. Cette "révélation" me fit m'effondrer en larmes comme un convulsionnaire.
- Vous pleuriez comme un petit garçon démuni, un orphelin qui retrouve tout à coup ses parents.
- Aussi parce que j'avais l'impression que toute ma vie s'était établie sur de fausses bases. En me recréant un père beaucoup plus fort, je souhaitais aussi probablement être moi-même plus solide et je laissais s'exprimer en moi l'enfant abandonné.
- C'est curieux, ce genre de délire arrive plutôt à des jeunes gens immatures, mal intégrés socialement ou assez seuls. Aviez-vous consommé des drogues?
- Absolument pas.
- Après cette révélation, êtes-vous rentré ?
- Non, j'ai continué à errer, persuadé que je devais me laisser porter par la force intérieure qui s'était emparée de moi. Je dînai cependant dans un troquet du côté de Bastille puis me préoccupai de chercher un hôtel pour la nuit. Aucun de mes actes ne me semblait anodin, j'avais le sentiment qu'ils obéissaient à un plan occulte,qu'ils s'agençaient avec harmonie et tendaient vers un but inconnu mais forcément sublime. J'étais comme en état d'hypnose. Aucune rencontre, aucun fait, aucun obstacle ne me semblait le fruit du hasard. J'avais le sentiment aussi que ma relation avec les passants ou mes éventuels interlocuteurs s'était subtilement modifiée, au niveau quasiment micro-comportemental.
- Précisez.
- J'avais l'impression que la distance habituelle qu'on met entre soi et les autres, selon un mécanisme inconscient qui relève de l'apprentissage des relations sociales, s'était troublée de manière infime. Toute rencontre devenait alors une aventure, j'avais l'impression de pouvoir susciter des attitudes ou des réactions auxquelles je n'étais pas habitué, comme si j'avais très subtilement changé de personnalité et que mes interactions avec les autres s'en trouvaient modifiées. Même si je restai la plupart du temps passif et mutique, probablement saisi par à ce qui se passait en moi, j'étais envahi par une sorte de sentiment de toute-puissance et d'impunité.
- D'impunité?
- Un jour, dans la rue du roi de Sicile qui se trouve dans le quartier du Marais, je voulus à tout prix pénétrer dans une demeure, m'imaginant y avoir passé plusieurs années de mon enfance. L'occupante des lieux, une matrone vociférante autant d'effroi que de colère, ne me chassa qu'à grand-peine. Je poursuivis mon chemin comme en état d'hypnose et vivant le moment présent. Parfois le doute m'assaillait et je sombrai alors dans de fugitifs mais intenses moments d'inquiétude, voire de terreur; je me souviens d'un soir où je déambulai tête basse et désespéré du côté de Ménilmontant, persuadé que toutes les polices de France me recherchaient et que je vivais mes dernières heures de liberté.
- Quel crime aviez-vous donc commis?
- Je l'ignore mais il devait être digne de faire la une des journaux...
Mes drôlatiques errements donnèrent lieu à bien d'autres situations, toutes plus cocasses les unes que les autres mais qui seraient trop longues à restituer en totalité. Il faudrait par exemple que je raconte comment, en me mêlant à divers groupes et en interpellant les passants, je faillis provoquer une émeute sur la piazza Beaubourg. Ou bien encore ma rencontre avec Liz, une architecte d'origine péruvienne pour qui je voulus dévaliser les grands magasins et les joailliers de la place Vendôme. Elle m'avait curieusement surnommé Izo car je n'avais pu lui donner mon nom, l'ayant tout simplement oublié. Peut-être au fond inquiète de mon étrange état qu'elle faisait mine de prendre pour de l'histrionisme, elle m'hébergea trois jours dans son gentil trois-pièces donnant sur le Luxembourg avant que je lui fausse compagnie à la cloche de bois.
- ...pour enfin regagner le domicile conjugal peut-être?
- Nullement. L'idée que je devais partir pour Oslo s'était imposée tout à coup et je me fis conduire en taxi à Roissy sans avoir consulté les horaires ni m'être avisé que je n'avais pas mon passeport. Je suivais mes impulsions et ma vie était devenue une sorte de rêve éveillé, un chemin onirique que je suivais dans un état permanent de transe et dont le terme encore inaperçu devait expliquer a posteriori les moindres péripéties. Je rebroussai chemin vers le coeur de Paris pour me perdre dans le quartier de St Germain. J'eus alors l'étrange sentiment que je me diluais peu à peu dans la foule, que chaque passant que je croisais s'appropriait une partie de moi-même, que j'étais chacun d'eux et que je perdais mon identité. Assailli par cet épouvantable sentiment de dépersonnalisation, j'éprouvai le besoin de téléphoner chez moi à N. pour entendre la voix d'Olivia. Je laissai sonner trois longues minutes puis, au moment où j'allais renoncer, me rappelant qu'Olivia ne devait pas encore être de retour, quelqu'un décrocha et demanda : Oui?
Bouleversé, je reconnus immédiatement ma voix à l'autre bout du fil."

mardi 26 janvier 2010

Moon river

Moon River est une chanson composée par Johnny Mercer et Henry Mancini en 1961, interprétée la même année par Audrey Hepburn dans Diamants sur Canapé. Elle a été très souvent réutilisée au cinéma, dans Minority Report de Spielberg par exemple, ou bien dans Rois et Reine de Despleschin.



Moon River, wider than a mile,
I'm crossing you in style some day.
Oh, dream maker, you heart breaker,
wherever you're going I'm going your way.
Two drifters off to see the world.
There's such a lot of world to see.
We're after the same rainbow's end--
waiting 'round the bend,
my huckleberry friend,
Moon River and me.

© 1961 Paramount Music Corporation, ASCAP

dimanche 24 janvier 2010

Seconde visite du professeur Falgout

"...Les années avec Olivia furent les plus heureuses et les plus stimulantes de ma vie. Alors que j'hésitais et louvoyais avant notre providentielle rencontre , je me métamorphosai à son contact. Nous nous installâmes très rapidement ensemble dans un appartement confortable au coeur de la ville de N., sur les bords de l'Atlantique, où nous allions tous les deux suivre nos études, elle principalement de médecine, moi d'abord de médecine puis d'informatique. Nous ne cessions de travailler dans l'enthousiasme en nous encourageant mutuellement, nous accordant en général une trève les vendredis soirs pour réunir quelques amis autour d'un dîner, occasion de défoulements parfois homériques mais aussi de discussions passionnées pseudo-savantes. Olivia était toujours au fait des dernières avancées dans son domaine de prédilection mais pouvait aussi disserter sur la physique, les théories de l'auto-organisation, la biologie du cerveau. Levée aux aurores même quand nous avions prolongé notre labeur étudiant jusque dans la nuit, elle adorait parcourir des revues scientifiques de tous horizons, notamment Nature. Elle se passionna aussi peu à peu pour l'informatique et la programmation, allant jusqu'à réaliser des petits programmes destinés à reconstituer sous forme d'animation certains mécanismes physiologiques. Elle aimait aussi la littérature et la musique, elle jouait assez bien du violon. Pendant ces folles années, nous n'avons pas cessé pendant nos moments de liberté de voyager et parcourir tous les continents. J'avais bien sûr totalement oublié les moments difficiles de mon adolescence.
Et puis quelque chose est arrivé, totalement absurde et inattendu...

vendredi 22 janvier 2010

Le malheur russe

Au petit déjeuner ce matin, discussion passionnée avec les pensionnaires à propos du dernier film de Lounguine, Tsar qui évoque le personnage d'Ivan le Terrible. En 1565, celui-ci sombre peu à peu dans la paranoïa. Il vient de s'octroyer comme domaine personnel une grande partie du royaume, mettant ainsi en place l'opritchnina, où règne par la terreur sa garde personnelle. Le métropolite Philippe va tenter sans succès et au prix de sa vie de le ramener à la raison. Quand il lui demande d'épargner les boyards en lui rappelant que Dieu châtiera les pêcheurs, le tsar sanguinaire et édenté (Piotr Mamonov) lui rétorque que Dieu est bonté et que lui seul peut faire le travail.
Alors que la première partie de son règne avait été plutôt prospère et placée sous le signe de réformes progressistes, cette période de terreur entraîna de graves troubles sociaux jusqu'à la fin de son règne en 1584. Le film se clôt sur la solitude du souverain muré dans sa paranoïa sanguinaire. Entre deux biscottes, Boris, dont le père est d'origine russe et qui connaît St-Petersbourg comme sa poche, se met à nous conter mille anecdotes sur Ivan Grozny jusqu'à ce qu'on nous chasse de la salle commune.

mercredi 20 janvier 2010

On the road again (Bernard Lavilliers)

ON THE ROAD AGAIN
(Bernard Lavilliers)



Nous étions jeunes et larges d'épaules
Bandits joyeux, insolents et drôles
On attendait que la mort nous frôle

On the road again, again
On the road again, again

Au petit jour on quittait l'Irlande
Et derrière nous s'éclairait la lande
Il fallait bien un jour qu'on nous pende

On the road again, again
On the road again, again

La mer revient toujours au rivage
Dans les blés mûrs y a des fleurs sauvages
N'y pense plus, tu es de passage

On the road again, again
On the road again, again

Nous étions jeunes et larges d'épaules
On attendait que la mort nous frôle
Elle nous a pris les beaux et les drôles

On the road again, again
On the road again, again

Ami sais-tu que les mots d'amour
Voyagent mal de nos jours
Tu partiras encore plus lourd

On the road again, again
On the road again, again
On the road again, again
On the road again, again
On the road again

lundi 18 janvier 2010

L'homme de pierre

Dans Le Monde, l'historien américain Tony Judt, 62 ans, décrit la maladie de Charcot dont il souffre. Il s'agit d'une maladie neurologique qui s'explique par une anomalie des neurones qui commandent les mouvements. Quand le cerveau donne l'ordre à un muscle de se contracter, le motoneurone ou neurone intermédiaire situé dans la moelle épinière est incapable de relayer cet ordre. Le muscle qui n'est plus sollicité perd peu à peu de sa taille et c'est la paralysie progressive des bras et des jambes.
Prisonnier de son corps pétrifié, Tony Judt a dû développer des stratagèmes pour simplement parvenir à s'endormir:

La solution que j'ai trouvée consiste à faire défiler mentalement ma vie, mes pensées, mes fantasmes, mes souvenirs, mes faux souvenirs et autres, jusqu'à ce que je tombe par hasard sur des évènements, des gens ou des récits dont je peux me servir pour détourner mon esprit du corps dans lequel il est enfermé. Ces exercices mentaux doivent être assez intéressants pour captiver mon attention et me faire oublier une démangeaison insupportable à l'intérieur d'une oreille ou au bas des reins. Mais ils doivent être également assez ennuyeux et prévisibles pour servir de prélude et d'incitation efficace au sommeil.[...]
Je suppose que je devrais au moins trouver un semblant de satisfaction dans le fait d'avoir découvert en moi-même le genre de mécanisme de survie dont la plupart des gens n'entendent parler que dans les récits de survivants de catastrophes naturelles ou de cellules d'isolement. [...] Grâce à mon incapacité à prendre des notes ou à en préparer, ma mémoire s'est considérablement améliorée avec l'aide de techniques adaptées. [...] Il n'y a aucune grâce salvatrice à être confiné dans un corset d'acier, froid et implacable. Mes nuits sont captivantes; mais je pourrais m'en passer.(cité dans Le Monde du 17 01 2010)

dimanche 17 janvier 2010

Mon antre



C’est dans ces 40 mètres carrés, à proximité de la gare d’Austerlitz, que je passe le plus clair de mon temps. Si le doute me saisit parfois, je sais au fond de moi que je n’abandonnerai jamais, pas après toutes ces années d’effort, de recherches parfois inutiles, toujours épuisantes, de résultats souvent modestes mais gros de promesses futures, pas après avoir parcouru ce si long chemin, aussi périlleux que riche de surprises et d’heureuses péripéties, pas après avoir mené cette minutieuse enquête qui m’aura conduit dans tous les temps et dans tous les lieux, pas avant d’être parvenu au terme de cette aventure inouïe dont je ne pourrais restituer dans le meilleur des cas que les traits les plus apparents.

Lieu de travail et d’étude dont les quatre murs sont encombrés de livres qui vont des ouvrages d’anatomie et de physiologie à des grimoires de philosophie ou d’histoire des sciences, traités du labyrinthe, palais de mémoire, en passant par toutes sortes d’essais et de romans. Au fil du temps, une collection de CD et de DVD est venue un peu agrémenter cette cathédrale livresque.
Je me bats régulièrement avec les femmes de ménage pour que rien ne soit dérangé. Sur un petit bureau d’angle repose un ordinateur portable muni d’une connexion internet, indispensable fenêtre sur le monde extérieur. Un lit très simple me permet de passer mes nuits au milieu de cet austère mobilier.

Depuis déjà longtemps je ne quitte plus guère ces lieux.

vendredi 15 janvier 2010

Visite du professeur Falgout

[Comme ce sera toujours le cas par la suite, les noms des protagonistes ont été modifiés]


Aujourd'hui, une fois le petit-déjeuner ingurgité, j'ai reçu à sa demande le professeur Falgout, neuro-psychiatre de renom toujours avide de précisions et détails sur ce que je peux lui apprendre. C'est un sot, imbu de lui-même, qui n'y comprend goutte mais écoute à ravir. Il surgit vers 9h30, blouse immaculée et épais dossier marron sous le bras, suivi comme d'habitude de quelques-unes de ses adjointes, en général jeunes et jolies, aujourd'hui au nombre de trois parmi lesquelles je reconnais le docteur Sudreau, pimpante brunette qui me consent un sourire. Comme d'habitude elles ne piperont mot durant tout l'entretien.
"Comment allez-vous aujourd'hui cher ami? "
Sa poignée de main faussement chaleureuse atténue à peine la condescendance du ton.
- Ma foi, je n'ai à nouveau pas fermé l'oeil de la nuit
- Allons bon, encore une insomnie complète?
- Non, je ne suis heureusement plus dans cet état, je vais certainement récupérer la nuit prochaine.
Il s'assied, déploie son dossier et commence à griffonner.
- Si nous reprenions depuis le début, j'aimerais mieux comprendre comment vous êtes parvenu à cette...découverte.
Je l'interromps aussitôt, agacé:
- Il me semble que nous avons déjà parlé du processus dans son ensemble, je croyais que vous veniez pour me demander de préciser un point particulier.
- Pour vous tout a commencé vers dix-huit ans n'est-ce pas?
- Oui, une longue période pendant laquelle j'étais freiné dans mes efforts intellectuels, mes études, je ne savais quel chemin emprunter. Cela a dégénéré un beau matin dans une vraie pulsion suicidaire.
- Comment s'est manifestée cette "pulsion"?
- Cela n'a duré qu'une seconde, j'ai eu envie de sauter par la fenêtre alors que j'étais encore couché, au fond de mon lit. C'était ridicule, même si j'avais sauté, je n'aurais pu que me blesser, la fenêtre n'était qu'à huit mètres du sol. Mais la terreur de cette soudaine pulsion m'a poussé immédiatement à alerter l'entourage.
- Qu'en est-il résulté?
- Hospitalisation, plusieurs semaines de torture mentale entre dépression et moments plus exaltés en réaction probable à ces moments de dépression.
- Et puis?
- Et puis plus rien, j'ai envoyé paître les médecins, préférant trouver mes propres solutions.
- C'est alors que vous avez rencontré cette jeune femme, cette... Olivia.
- Une étudiante en médecine originaire de Vérone, musicienne et qui connaissait six langues. Elle avait beaucoup voyagé grâce à ses parents et cela avait probablement favorisé chez elle une grande ouverture d'esprit.
- Elle vous a initié...
- à beaucoup de choses mais elle a surtout éveillé ma curiosité pour ce que nous appelons aujourd'hui les neurosciences. Je me destinais plutôt à l'origine au droit du travail et cette rencontre a fait bifurquer mes choix.
Falgout tient encore à éclaircir certains épisodes de ma jeunesse puis consent enfin à se lever et, suivi de ses "Falgout girls" comme nous nous amusons à les désigner entre nous, quitte prestement mes appartements non sans avoir promis de revenir rapidement.
Je me plonge aussitôt dans mes lectures, à peine dérangé par les annonces sonores de la gare d'Austerlitz toute proche, espérant bien y consacrer toute la journée.

jeudi 14 janvier 2010

Ouverture

....derrière la fenêtre verrouillée, la nuit est tombée depuis déjà quelques heures.
De la gare d'Austerlitz toute proche retentissent avec régularité les annonces des départs de trains.
Le couloir est silencieux, les autres sont sans doute encore dans la salle commune à jouer au scrabble ou au Monopoly. Ma télévision privée, juchée sur sa plate-forme murale amovible, diffuse Alien de Ridley Scott. Je suis d'un oeil morne les contorsions de Sigourney Weaver enfilant sa combinaison spatiale pour échapper au monstre tout proche. "Ma bonne étoile" s'encourage-t-elle d'un murmure, "ma bonne étoile". Malgré ma torpeur, je me souviens d'une réplique entendue dans un film plus récent:
"Que fait un homme lorsqu'il rencontre un monstre?
- Il le combat
- Non, il chante"